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L'abolition des privilèges : Nuit du 4 Août |
Le 3 août 1789, le duc d'Aiguillon lança l'idée au Club Breton d'une abolition des droits seigneuriaux. Le lendemain,
en fin de soirée, Le Vicomte
de Noailles propose à l'Assemblée
Nationale de supprimer les privilèges pour
ramener le calme dans les provinces. Le Duc d'Aiguillon proposa l'égalité
de tous devant l'impôt et le rachat des droits
féodaux. Dans une ambiance indescriptible tour à tour,
Le Guen de Kerangal, Le vicomte
de Beauharnais Lubersac, l'évêque de
La Fare vont surenchérir en
supprimant les banalités, les pensions sans titre, les juridictions
seigneuriales, le droit de chasse, l’abolition des privilèges
ecclésiastiques. Le duc
du Châtelet proposa le rachat de la dîme. Enfin
termina la séance en apothéose en proclamant Louis XVI restaurateur de la liberté française ». En une nuit
les fondements du système par ordres vont s'effondrer ! Les jours
suivants le clergé essaya de revenir sur la suppression de la dîme mais le
président de l'assemblée Le
Chapelier n'ayant accepté que des discussions sur la
forme, les décrets du 4 août furent
définitivement rédigés le 11. Dès le lendemain Louis
XVI écrivit à l’archevêque d’Arles :
« Je ne consentirai
jamais à dépouiller mon clergé, ma noblesse. Je ne donnerai pas ma
sanction à des décrets qui les dépouilleraient ; c’est alors que le
peuple français pourrait m’accuser d’injustice et de faiblesse. Monsieur
l’archevêque, vous vous soumettez aux décrets de la Providence ; je
crois m’y soumettre en ne me livrant point à cet enthousiasme qui s’est
emparé de tous les ordres, mais qui ne fait que glisser sur mon âme. Si la
force m’obligeait à sanctionner, alors je céderais, mais alors il n’y
aurait plus en France ni monarchie ni
monarque. » Louis XVI n'accordera sa
sanction à ces décrets que contraint le 5
octobre
1789. Art. 1er L'Assemblée
nationale détruit entièrement le régime féodal. Elle décrète que, dans les
droits et les devoirs tant féodaux que censuels, ceux qui tiennent à la
main-morte réelle ou personnelle, et à la
servitude personnelle, et ceux qui les représentent, sont abolis sans
indemnité ; et tous les autres sont déclarés rachetables, et le prix
et le mode de rachat seront fixés par l'Assemblée nationale. Ceux desdits
droits qui ne sont points supprimés par ce décret continueront néanmoins
d'être perçus jusqu'au remboursement. Art. 2. Le droit exclusif
des fuies et colombiers est aboli. Les pigeons seront enfermés aux époques
fixées par les communautés durant lequel temps, ils seront regardés comme
gibier, et chacun aura le droit de les tuer sur son
terrain. Art. 3. Le droit exclusif de
la chasse ou des garennes ou vertes est pareillement aboli, et tout
propriétaire a le droit de détruire ou faire détruire, seulement sur ses
possessions, toute espèce de gibier, sauf à se conformer aux lois de
police qui pourront être faites relativement à la sûreté publique. Toutes
les capitaineries même royales, et toutes réserves de chasse, sous quelque
dénomination que ce soit, sont pareillement abolies ; et il sera
pourvu, par des moyens compatibles avec le respect dû aux propriétés et à
la liberté, à la conservation des plaisirs personnels du Roi. M. le
président est chargé de demander au Roi le rappel des galériens et des
bannis pour simple fait de chasse., l'élargissement des prisonniers
actuellement détenus, et l'abolition des procédures existantes à cet
égard. Art. 4. Toutes les
justices seigneuriales sont supprimées sans aucune indemnité, et
néanmoins les officiers de ces justices continueront leurs fonctions
jusqu'à ce qu'il ait été pourvu par l'Assemblée nationale à
l'établissement d'un nouvel ordre judiciaire. Art. 5. Les dîmes de toute
nature, et les redevances qui en tiennent lieu, sous quelques
dénominations qu'elles soient, connues et perçues, même par abonnement,
possédées par les corps séculiers et réguliers, par les bénéficiers, les
fabriques, et tous les gens de main-morte, même
par l'ordre de Malte, et d'autres ordres religieux et militaires, même
celles qui auraient été abandonnées à des laïques, en remplacement et pour
option de portions congrues, sont abolies, sauf à aviser aux moyens de
subvenir d'une autre manière à la dépense du culte divin, à l'entretien
des ministres des autels, au soulagement des pauvres, aux réparations et
reconstructions des églises, et presbytères, et à tous les établissements,
séminaires, écoles, collèges, hôpitaux, communautés et autres, à
l'entretien desquels elles sont actuellement affectées. Et cependant,
jusqu'à ce qu'il y ait été pourvu, et que les anciens possesseurs soient
entrés en jouissance de leur remplacement, l'Assemblée nationale ordonne
que lesdites dîmes continueront d'être perçues suivant les lois et en la
manière accoutumée. Quant aux autres dîmes, de quelque nature qu'elles
soient, elles seront rachetables de la manière qui sera réglée par
l'Assemblée ; et jusqu'au règlement à faire à ce sujet, l'Assemblée
nationale ordonne que la perception en sera aussi
continuée. Art. 6. Toutes les rentes
foncières perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de quelque espèce
qu'elles soient, quelle que soit leur origine, à quelques personnes
qu'elles soient dues, gens de main-morte, domanistes, apanagistes, ordre de Malte, seront
rachetables ; les champarts de toute espèce, et sous toutes
dénominations le seront pareillement, au taux qui sera fixé par
l'Assemblée. Défense seront faites de plus à l'avenir créer aucune
redevance non remboursable. Art. 7. La vénalité des
offices de judicature et de municipalité est supprimée dès cet instant.
La justice sera rendue gratuitement. Et néanmoins les officiers
pourvus de ces offices continueront d'exercer leurs fonctions et d'en
percevoir les émoluments jusqu'à ce qu'il ait été pourvu par l'Assemblée
aux moyens de leur procurer leur remboursement. Art. 8. Les droits casuels
des curés de campagne sont supprimés, et cesseront d'être payés aussitôt
qu'il aura été pourvu à l'augmentation des portions congrues et à la
pension des vicaires, et il sera fait un règlement pour fixer le sort des
curés des villes. Art. 9. les privilèges
pécuniaires, personnels ou réels, en matière de subsides, sont abolis
à jamais. La perception se fera sur tous les citoyens et sur
tous les biens, de la même manière et de la même forme ; et il va
être avisé aux moyens d'effectuer le payement proportionnel de toutes les
contributions, même pour les six derniers mois de l'année de l'imposition
courante. Art. 10. Une constitution
nationale et la liberté publique étant plus avantageuses aux provinces que
les privilèges dont quelques-unes jouissaient, et dont le sacrifice est
nécessaire à l'union intime de toutes les parties de l'empire, il est
déclaré que tous les privilèges particuliers de provinces,
principautés, pays, cantons, villes et communautés d'habitants, soit
pécuniaires, soit de toute autre nature, soient abolis sans retour, et
demeureront confondus dans le droit commun de tous les
français. Art. 11. Tous les
citoyens, sans distinction de naissances, pourront être admis à tous
les emplois et les dignités ecclésiastiques, civiles et militaires, et
nulle profession utile n'emportera dérogeance. Art. 12. À l'avenir il ne
sera envoyé en cour de Rome, en la vice-légation d'Avignon, en la
nonciature de Lucerne, aucuns deniers pour annales ou pour quelque cause
que ce soit ; mais les diocésains s'adresseront à leurs évêques pour
toutes les provisions de bénéfices et dispenses, lesquelles seront
accordées gratuitement, nonobstant toutes réserves, expectatives et
partages de mois, toutes les églises de France devant jouir de la même
liberté. Art. 13. Les déports, droits
de cotte-morte, dépouilles, vacat, droits censaux,
deniers de Saint Pierre, et autres du même genre établis en faveur des
évêques, archidiacres, archiprêtres, chapitres, curés primitifs et tous
autres, sous quelque nom que ce soit, sont abolis, sauf à pourvoir, ainsi
qu'il appartiendra, à la dotation des archidiaconés et des archiprêtres
qui ne seraient pas suffisamment dotés. Art. 14. La pluralité des
bénéfices n'aura plus lieu à l'avenir, lorsque les revenus du bénéfice ou
des bénéfices dont on sera titulaire excèderont la somme de
Art. 15. Sur le compte qui
sera rendu à l'Assemblée nationale de l'état des pensions, grâces et
traitements, qu'elle s'occupera, de concert avec le Roi, de la suppression
de celles qui seraient excessives, sauf à déterminer à l'avenir une somme
dont le Roi pourra disposer pour cet objet. Art. Art. Art. Analyse /
Conclusion Nous sommes au XXIème siècle, il nous a semblé opportun de
rappeler cette date historique de la nuit du 4 août 1789 et de décrire les
faits qui s’y sont déroulés. En une nuit, tout a
basculé ! Qui peut prévoir l’avenir dans quelque pays que ce soit, y
compris en France ? Depuis plusieurs décennies,
il nous semble que des femmes et hommes politiques responsables de notre
pays ont « occulté » ce fait historique, qui pourtant montre que
rester humble dans certaines circonstances serait mieux qu’une certaine
arrogance, qui pourrait finir un jour (qui sait…) par une nouvelle nuit
historique, tant les citoyens se rendent compte du décalage entre le
pouvoir et leur vie quotidienne. Il nous semble intéressant
de constater que la grande idée de cette nuit du 4 août fut l’abolition des privilèges… Ce texte pour
l’époque était plus révolutionnaire que certaines propositions de nos
partis extrémistes de gauche, faudrait-il donc revenir à la Royauté pour
que tous les privilèges qui existent actuellement soient de nouveau
abolis ? En ce qui nous
concerne, nous choisissons la République, mais encore faudrait-il que
cette République fasse, elle aussi, sa «nuit historique», sinon cela
pourrait, un jour futur, ressembler au Mur de Berlin… La aussi, en
une nuit, tout a basculé… Nous proposons de commémorer cette
nuit du 4 août 1789, aussi importante que la date du 14 Juillet, par
l’accès gratuit de tous les musées et édifices nationaux à tous les
citoyens la journée du 4 août, d’autre part nous proposons que l’Assemblée
Nationale réactualise ce décret pour l’adapter à notre
époque. |